Aider autrui et (re)trouver estime de soi

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Coordonné par l’agence d’outplacement à finalité sociale Citéa, le projet Orca poursuit un triple objectif : favoriser la mise à l’emploi de personnes soucieuses d’exercer dans un métier d’aide, valoriser ces mêmes métiers et permettre l’épanouissement personnel de celles et ceux qui s’inscrivent dans le parcours de formation qualifiante. Un beau challenge, soutenu par le Fonds Dr. Daniël De Coninck.

« L’insertion ou la réinsertion professionnelle des personnes qui ont des parcours de vie parfois accidentés exige, pour être couronnée de succès, une approche multidimensionnelle. Il ne suffit pas de s’inscrire à une formation qualifiante : il faut aussi retrouver son estime de soi, s’intégrer à un réseau social, être soutenu dans son apprentissage et ce, jusqu’à l’emploi. » Laetitia Mélon, coordinatrice de Citéa, une coopérative d’insertion et de réinsertion socioprofessionnelle à finalité sociale, sait de quoi elle parle : son organisation accompagne celles et ceux qui éprouvent des difficultés à lever les freins sociaux, économiques et familiaux qui les empêchent de mettre toutes les chances de leur côté dans leur quête d’emploi.

Forte de cette expérience, Citéa a élaboré le projet Orca (Orientation ReConversion dans les métiers de l’Aide à domicile), qui bénéficie du soutien du Fonds Dr. Daniël De Coninck, géré par la Fondation Roi Baudouin. Une belle manière de faire se rencontrer l’intérêt des demandeurs d’emploi pour les métiers axés sur l’aide et les soins à domicile – aide familial.e, aide-soigant.e, aide-ménager.e social.e – et les besoins de plus en plus criants d’une partie de la population vieillissante, fragilisée, qui a besoin d’aide pour gérer le quotidien.

Un parcours ambitieux
L’ambition du programme Orca est de co-construire une filière intégrée – « c’est-à-dire qui facilite les transitions pour les personnes qui font le parcours » – entre les différents organismes d’insertion socioprofessionnelle et de formation, et ce, avec l’implication concrète des employeurs potentiels. Qui dit ‘filière intégrée’ dit, bien évidemment, ‘partenariat’. À commencer avec le Forem, qui facilite le recrutement des personnes pour le programme Orca – en l’occurrence, ici, en majorité des demandeuses d’emploi – désireuses de se former au métier d’aide familiale, ou d’aide-soignante, ou encore d’aide-ménagère sociale. Ce partenariat avec l’Office wallon de l’emploi contribue à sécuriser administrativement les stagiaires pendant toute la durée du parcours de formation.

Comment se déroulent concrètement les choses ? Après le ‘recrutement’ proprement dit des candidat.es par le Forem, les personnes inscrites dans le parcours Orca passent, si nécessaire, par une période de préformation, c’est-à-dire une remise à niveau dispensée par un organisme d’insertion socioprofessionnelle, au cours de laquelle elles sont outillées pour pouvoir suivre sans encombre une formation qualifiante. À ce stade du parcours, elles participent à l’une des formations qualifiantes dispensées par l’une des écoles partenaires de Mont-sur-Marchienne, Châtelet ou Liège.

L’objectif que nous poursuivons avec ce parcours Orca ne se limite pas à les ‘former’, mais bien à les outiller, les encadrer, les soutenir tout au long du chemin, afin qu’elles puissent s’épanouir dans toutes leurs dimensions, professionnelles et humaines

— Laetitia Mélon, coordinatrice de Citéa

Au service des personnes, dans toutes leurs dimensions
« Ces différents partenaires sont animés par la même vision sociétale et par la volonté que le parcours du/de la demandeur.euse d’emploi soit couronné de succès », insiste Laetitia Melon. Et pour que cela fonctionne, il faut que les stagiaires inscrit.es dans le trajet de formation bénéficient tout au long d’un soutien, d’une écoute, de ressources, d’aide, d’un coaching adéquats. Le public visé par Citéa dans le cadre du parcours Orca se divise grosso modo en deux catégories principales : 1) des jeunes aux profils socioéconomique et scolaire diversifiés, qui n’ont pas encore d’expérience professionnelle, 2) des travailleurs qui ont récemment perdu leur emploi ou ayant des contrats précaires et désirant se reconvertir.

« Souvent, ces personnes sont confrontées à des difficultés personnelles, organisationnelles, familiales, etc., et ne disposent pas toujours des ressources pour y faire face », souligne la coordinatrice. « L’objectif que nous poursuivons avec ce parcours Orca ne se limite donc pas à les ‘former’, mais bien à les outiller, les encadrer, les soutenir tout au long du chemin, afin qu’elles puissent s’épanouir dans toutes leurs dimensions, professionnelles et humaines, et développent ainsi leur estime de soiEt on fait tout, aussi, pour les accompagner après la formation, de manière à ce qu’elles décrochent réellement un emploi : les CSD (Centrales de services à domicile) de Charleroi et du Centre, et aussi de Liège, sont également partenaires du projet. »

Une co-construction permanente
Le démarrage d’Orca a pris un peu de retard sur le calendrier annoncé (début 2020), crise sanitaire oblige. Mais là, il est bel et bien lancé : deux groupes d’une dizaine de personnes chacun ont déjà suivi la préformation et ont désormais démarré leur formation qualifiante, qu’elles termineront au bout de 18 mois (aide familiale) à 24 mois (aide-soignante), soit respectivement en janvier et en juin 2022. Et un troisième groupe, inscrit dans le parcours – plus court – de formation aide-ménager social, a obtenu sa certification en avril 2021. Au fil des expériences, le projet pilote se co-construit, s’ajuste : « Le partenariat, entre Citéa et les autres organismes impliqués, mais aussi avec les stagiaires, cela exige beaucoup d’énergie, de créativité, d’échanges, de communication », sourit Laetitia Melon. « Le projet se construit donc au fur et à mesure, et ensemble : entre le premier groupe et le troisième, nous avons déjà modifié certaines de nos approches. C’est ce qui fait toute la richesse du projet Orca. »

La foi de Meredith
Meredith, 46 ans, a intégré le programme en septembre 2020. Elle est sur le point de décrocher sa certification en tant qu’aide familiale. Sa vie, dit-elle, a pris un nouveau départ depuis ce moment béni où une conseillère du Forem l’a incitée à faire le pas. « Je sortais d’un burn-out suite à un choc émotionnel, qui m’avait contrainte à abandonner mon travail de toiletteuse pour chiens, que je faisais en tant qu’indépendante. Ce choc m’a incitée à entamer un parcours de développement personnel, qui m’a permis de mieux cerner mes talents et mes envies, et m’a redonné le goût, l’envie d’apprendre et de pousser de nouvelles portes. J’ai donc poussé celle du programme Orca, et je m’en félicite ! Cette formation m’a permis de faire des ponts, de créer des liens entre tout ce que j’ai découvert ces dernières années, alors que je réalisais un travail sur moi, et le métier d’aide à la personne auquel je me destine désormais : c’est comme si ma personne s’unifiait. »

À l’issue de son stage professionnel dans le secteur de l’aide et des soins à domicile, Meredith a bon espoir de dénicher un emploi dans cet environnement qu’elle apprécie : « Je fais tout ce que je peux pour me rendre utile et j’aime beaucoup les contacts humains, être proche des gens : je suis très optimiste quant à mes chances de décrocher un vrai boulot dans ce domaine. » On y croit dur comme fer, avec elle.

©Emmanuel Crooÿ
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