Alzheimer : bienvenue dans notre quartier !

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A Schaerbeek, dans le quartier Dailly, Alzheimer n’est plus un mot tabou, synonyme d’impuissance et d’exclusion. Grâce au partenariat entre la maison médicale Le Noyer et l’asbl Alzheimer Belgique, les personnes confrontées à la maladie trouvent désormais dans leur propre voisinage un environnement accueillant et soutenant.

Aussi déstabilisante pour les aidants proches que pour les patients eux-mêmes, la maladie d’Alzheimer ne pousse pas aux confidences : on n’en parle pas, même et surtout à ses amis, à ses voisins ou aux membres de son club de seniors, tant on craint le changement de regard, l’incompréhension, la mise à l’écart. « Pourtant, insiste Marie Bourcy, directrice d’Alzheimer Belgique, le diagnostic n’est pas une condamnation : il ouvre sur une période souvent longue, où il est possible de vivre presque normalement avec la maladie, chez soi, dans son décor familier, en poursuivant ses activités habituelles… À condition que la crainte et les préjugés aient été préalablement désamorcés.»

Lieu de vie
D’où l’importance d’un réseau de proximité, à l’échelon du quartier où la personne a ses habitudes et ses relais. « Nous avions été en contact avec la maison médicale Le Noyer à l’occasion d’un événement commun, et nous avions découvert qu’au fil des années, elle était devenue un véritable lieu de vie, avec des consultations médicales, bien entendu, mais aussi d’autres activités – gymnastique douce, taï-chi, yoga, atelier couture, ciné-club… – qui attiraient un public différent de celui auquel nous nous adressons en général, et ce dans un quartier densément peuplé,  caractérisé par sa diversité culturelle. »

Ensemble
Persuadée d’avoir trouvé le cadre idéal pour un premier essai d’ancrage local, l’équipe d’Alzheimer Belgique a proposé son idée à celle de la maison médicale. « Nous avons dû insister un peu, reconnaît Marie Bourcy, car une maison médicale, si impliquée soit-elle dans la promotion de la santé, a son propre rythme et ses propres priorités. Mais nos interlocuteurs n’ont pas tardé à comprendre qu’en combinant notre expertise et leurs capacités d’interaction, nous pourrions apporter un plus aux habitants du quartier. Nous avons donc construit et déposé le projet ensemble, pour le mener à bien, ensemble toujours, durant l’année 2019.»

En confiance
D’abord par des séances d’information dans les locaux de la maison médicale, destinées à sensibiliser le voisinage à la maladie d’Alzheimer et aux troubles apparentés,  ainsi qu’aux solutions d’accompagnement possibles. « La maison médicale a annoncé l’initiative dans tout le quartier, par l’intermédiaire des pharmacies, des commerces, etc. de sorte que les habitants sont venus nombreux, souligne Marie Bourcy. Et ces réunions ont été particulièrement chaleureuses, et donc très riches en termes d’échanges, avec un vrai partage, parce que, dans ‘leur’ maison médicale, les personnes se sentaient en confiance, dans une ambiance sereine et amicale. » Les messages sur le projet de vie, la relation aidant-aidé et la problématique du maintien à domicile n’en ont été que mieux accueillis et compris.

Mieux et plus longtemps
« L’idée était de montrer que, dans la maladie d’Alzheimer, il y a toujours de la vie. Et qu’un environnement adapté à la différence et à une perte d’autonomie progressive permet de vivre mieux et plus longtemps chez soi. Souvent, quand les proches décident que la personne doit entrer en maison de repos, qu’elle ne peut plus vivre seule, c’est d’abord parce qu’ils ont peur pour elle. Le fait que les voisins, les commerçants de proximité soient au courant, attentifs à certains comportements inadaptés et prêts à aider, le cas échéant, pour débloquer une situation ne peut que les rassurer… Plus on parlera de cette maladie, de manière à en donner une autre image, moins négative, à la dédramatiser, mieux on parviendra à préserver l’autonomie des personnes !»

Sur le terrain
En plus de ces réunions grand public, des permanences ‘Alzheimer’ ont été mises en place au sein de la maison médicale. « Ce partenariat avec un acteur de proximité nous a permis – et nous permet encore – de toucher des personnes qui se posent des questions mais ne savent pas comment aller plus loin, parce qu’elles n’ont pas connaissance de notre existence, ni de toutes les initiatives susceptibles de leur faciliter la vie avec la maladie. » Même les médecins et autres soignants attachés à la maison médicale ont été surpris des possibilités d’interventions présentées par Alzheimer Belgique : « Nous avons organisé une réunion avec tous les membres de la maison médicale, sur leur temps d’échange en équipe, afin de leur montrer qu’au-delà de la promotion de la santé et de la sensibilisation, nous pouvions avoir un impact concret sur le maintien à domicile, et qu’ils pouvaient faire appel à nous dans les situations difficiles, notamment pour éviter l’épuisement des aidants proches. Alzheimer Belgique, ce sont aussi des psychologues, des ergothérapeutes, des professionnels de terrain qui sont là pour soutenir les familles.»

Point de contact
L’asbl a également profité de ce partenariat local pour contacter les acteurs communaux. « Une commune est aussi un acteur de proximité – et plus généraliste, car tout le monde ne dépend pas d’une maison médicale. L’idéal serait que, dans toutes les communes, il y ait un point de contact, une information disponible sur ce type de maladies. Parce qu’il existe des solutions, et pas forcément onéreuses. La question du financement peut se poser quand il faut multiplier les interventions et les relais à domicile, mais pas dans l’immédiat. C’est vraiment une problématique de santé publique qui doit être abordée à l’échelon local ! »

Astuces
L’expérience, en tout cas, a porté ses fruits, car les liens entre Le Noyer et Alzheimer Belgique ne sont pas près de se distendre. « Et d’autres maisons médicales commencent à nous demander de venir parler de la maladie, et nous adressent des familles concernées, précise Marie Bourcy. Malheureusement, la Covid nous a empêchés de présenter notre projet, comme nous l’avions prévu, devant les fédérations des maisons médicales. Mais ce n’est que partie remise ! » En attendant, leur partenariat a produit deux outils concrets, destinés aux acteurs de quartier : « Un petit guide réunissant des messages simples et des astuces de base, afin qu’ils se sentent plus à l’aise face aux personnes présentant des troubles cognitifs – il faut par exemple s’interroger pour savoir si la personne accepte le contact physique – et un annuaire reprenant toutes les ressources existant sur Schaerbeek pour rendre un quartier soutenant et accueillant dans le cadre de cette problématique… Si brève qu’ait été cette expérience, elle a prouvé l’importance de l’appui local, et j’espère qu’elle essaimera dans d’autres communes et d’autres quartiers. »

Lauréat 2018 dans le cadre de l’appel à projets ‘Quartiers solidaires en matière d’aide et de soins’.

Contact:
Marie Bourcy
Quai aux pierres de Taille 37-39, 1000 Bruxelles

Site d’Alzheimer Belgique

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