Conférence pour la première ligne : les deux chaires présentent l’état de leurs recherches

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Le Fonds Dr. Daniël De Coninck finance pendant cinq ans deux chaires interdisciplinaires afin d’encourager le développement d’une vision, de la recherche et de l’innovation dans la première ligne : Be.Hive en Fédération Wallonie-Bruxelles et l’Academie voor de Eerste Lijn en Flandre. Ces deux consortiums d’universités, de hautes écoles et d’autres acteurs concernés organisent conjointement, les 18, 20 et 21 mai, la Conférence pour la Première Ligne. L’occasion pour les deux chaires de présenter les premiers résultats de deux années de recherches intensives.

“La collaboration entre les deux chaires est une évidence et une nécessité”, souligne Thérèse Van Durme, coordinatrice de Be.Hive. “Malgré les différences entre le paysage institutionnel néerlandophone et francophone, il y a entre nous beaucoup plus de points communs que de différences et il ne sert à rien de vouloir faire de la recherche chacun dans son coin. Au contraire, nous avons à apprendre les uns des autres. En Flandre, on a par exemple beaucoup travaillé sur le concept de ‘goal-oriented care’ et il sera intéressant pour nous d’entendre les chercheurs flamands sur ce sujet. Du côté francophone, plusieurs recherches participatives mettent fortement l’accent sur l’implication des citoyens et il y a des enseignements utiles à retirer de ces expériences”.

Un enjeu transversal
Une série de chercheurs viendront donc présenter les résultats de leurs travaux sur différents aspects touchant aux soins de première ligne, depuis la collaboration interprofessionnelle jusqu’à l’évaluation de la qualité en passant, entre autres, par les soins de longue durée ou les soins centrés sur les objectifs de vie des personnes (‘goal-oriented care’). La conférence en ligne comprendra d’une part des séances plénières – notamment lors de l’exposé de l’oratrice invitée, Julie McInnes (université de Kent), qui a travaillé sur un projet européen d’intégration des soins de première ligne ; et d’autre part des séances parallèles, lors desquelles les participants devront faire un choix entre les deux thèmes proposés.

“Je pense que la collaboration interprofessionnelle sera l’un des thèmes centraux de la conférence, car c’est un enjeu transversal aux soins de première ligne”, estime Thérèse Van Durme. “Cette collaboration est par exemple indispensable pour gérer dans la durée des situations complexes ou liées à des maladies chroniques ou encore pour centrer les soins sur les objectifs de vie des personnes : cela suppose que différents professionnels regardent plus loin que leur propre domaine de compétence, se concertent et se transmettent des informations sur le patient afin de parvenir à une intégration des soins”.

Réorientation de la recherche
Céline Mahieu, sociologue et professeur à l’École de Santé publique (ULB), coordonne précisément les recherches sur la collaboration interprofessionnelle au sein de Be.Hive. “Nous avions établi un protocole de recherche, qui visait à identifier les innovations en matière de collaboration interprofessionnelle et qui devait démarrer en mars 2020… juste au moment où la crise sanitaire a éclaté !”, explique-t-elle. “Nous avons donc décidé de réorienter notre recherche et de voir comment la crise sanitaire a impacté la collaboration interprofessionnelle et a servi de révélateur pour faire apparaître certaines rigidités ou au contraire pour accélérer des évolutions au niveau de la première ligne”.

Cette question a été analysée sur deux territoires particulièrement touchés par la première vague du coronavirus (Bruxelles et le Hainaut) au travers d’une centaine d’entretiens qualitatifs, d’études de cas spécifiques, d’observations et de collectes de documents (procédures, consignes organisationnelles…).

Lors de la conférence, Céline Mahieu et ses collègues aborderont l’impact de la crise sanitaire sous plusieurs aspects : les publics vulnérables (comment de nouvelles formes de collaborations entre acteurs du social et de la santé se sont-elles construites ?), les outils d’échange informatisés (certains qui étaient à l’arrêt depuis des années ont connu une forte expansion, d’autres ont été critiqués pour des raisons touchant au partage des données), la collaboration entre la première et la deuxième ligne (comment, après avoir été isolée, la première ligne a-t-elle développé des collaborations ad hoc, puis plus structurelles avec la deuxième ligne ?), l’impact sur le traitement des pathologies chroniques, la conception de la collaboration interprofessionnelle dans les dispositifs de formation, la répartition des compétences entre professionnels (tantôt les acteurs se sont recentrés sur leur cœur de métier, tantôt ils sont intervenus en soutien d’autres métiers) et enfin l’impact de la crise sur les conditions de travail et le bien-être des professionnels.

Céline Mahieu : “La crise sanitaire a parfois donné un coup d’accélérateur à des projets qui étaient en veilleuse et a permis d’intensifier la collaboration interprofessionnelle. On a vu par exemple que l’accès à certains outils informatiques s’ouvrait à un plus grand nombre de métiers (moins qualifiés). On a assisté aussi à de nouvelles répartitions de tâches, en raison de l’accroissement de la charge de travail : le ‘middle management’ a souvent été amené à prendre davantage d’initiatives et à exercer de plus grandes responsabilités. Mais il est trop tôt pour dire si ces évolutions seront durables. Dans certains cas, une fois le pic de la crise passé, on est plus ou moins revenu à la ‘normale’ alors que, dans d’autres situations, des solutions provisoires ont ensuite pris une forme plus structurelle. Toutes nos recherches visent à déterminer dans quels cas et à quelles conditions des pratiques innovantes nées pendant la crise sanitaire peuvent être pérennisées à plus long terme”.

Des recherches qui sont encore en plein développement : “Ce que nous présenterons à la conférence, ce sera un état des lieux à mi-parcours, un ‘work in progress’, essentiellement centré sur la première vague du coronavirus. Les observations, les analyses et les études de cas se poursuivent et vont permettre d’affiner les résultats. Nous attendons d’ailleurs beaucoup de l’interaction avec les participants à la conférence, qui ne manqueront pas de nous suggérer d’autres cas pour compléter, confirmer ou nuancer nos hypothèses”, conclut Céline Mahieu.

Inscrivez-vous à la conférence via ce lien.

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