L’aide à domicile : bien plus que faire le ménage, les courses et les poussières

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Redorer le blason de professions injustement méconnues qui répondent  pourtant à des besoins criants d’une partie de la population : tel est l’objectif de l’Association des Services d’Aides aux Familles et aux Aînés (AsSAF)*, qui a été sélectionnée par le Fonds Dr. Daniël De Coninck pour ce beau projet. Il est urgent d’injecter du sang neuf dans les rangs des briseurs de solitude.

Le grand public est peu informé du travail de l’aide à domicile. Il connaît bien sûr celui des infirmier.e.s qui dispensent les soins à domicile. Mais les aide-ménager.e.s social.e.s, les aides familiales et les gardes à domicile travaillent dans l’ombre, et on a parfois tendance à penser que le travail consiste à « faire le ménage ». Pendant la pandémie, les projecteurs se sont surtout braqués sur les salarié.es des hôpitaux et des maisons de repos et ont quelque peu négligé les travailleur.se.s de l’aide à domicile. Ils.elles sont pourtant aussi des acteurs de première ligne, qui continuent à jouer un rôle fondamental pour tous ceux qui bénéficient de leurs services. « Nous nous efforçons de renvoyer une autre image de ces métiers pour qu’ils soient mieux connus, reconnus et valorisés » explique Audrey Maigre, chargée de mission à la FASD (Fédération de l’Aide & des Soins à Domicile) et coordinatrice pour l’AsSAF du projet sélectionné par le Fonds Dr. Daniël De Coninck, doté d’un montant de 150.000 euros et intitulé : « Construire avec les travailleurs d’aujourd’hui la manière d’attirer dans le secteur les travailleurs de demain ». Cette ambition sera affichée dès le printemps prochain dans une vaste campagne de communication.

Face aux besoins de la population et au phénomène du vieillissement, les sollicitations explosent.
« Durant cette crise sanitaire, nous avons pris conscience que le public connaissait mal nos métiers, témoigne Fabian Genard, conseiller adjoint à la direction à la Fédération wallonne de services d’aide à domicile (FEDOM) et trésorier de l’AsSAF. Et cela a renforcé notre volonté de communiquer sur les tâches de nos travailleuses de l’aide à domicile qui font bien plus que les courses, le ménage ou la cuisine. C’est un métier qui, historiquement, s’est construit sur la débrouille, puis sur l’entraide, la solidarité et le soutien. Mais aujourd’hui, il est devenu une véritable profession qui exige des compétences spécifiques » insiste-t-il.

« Ce projet va nous permettre de susciter des motivations auprès des personnes en quête de réorientation professionnelle. Car la demande ne cesse de croître : face aux besoins de la population et au phénomène du vieillissement, les sollicitations explosent. Les personnes plus âgées aspirent aujourd’hui à rester chez elles le plus longtemps possible. Elles sont de plus en plus nombreuses à privilégier les soins à leur domicile plutôt qu’un déménagement dans une maison de repos ou un séjour à l’hôpital » précise de son côté Audrey Maigre.

Les aides à domicile ne se bornent donc pas à faire quelques courses, préparer un repas et prendre les poussières. Il s’agit d’être véritablement présent auprès des bénéficiaires pour favoriser leur autonomie dans tous les méandres de la vie quotidienne : en fonction des besoins, les assister au réveil et au coucher, les impliquer dans la préparation des repas, assurer les soins de confort, les aider à prendre rendez-vous au centre de vaccination et s’y rendre avec eux, extraire la carte d’identité de leur portefeuille, gérer avec eux leurs factures, comprendre ce que le médecin leur prescrit pour leur permettre de comprendre eux-mêmes ensuite, ou assurer des gardes de nuit ou du week-end de manière à offrir quelques heures de répit à leurs aidants-proches. Une fois de plus, on ne parle pas de soins, mais de soutien aux activités de tous les jours. « La polyvalence et la complémentarité des tâches rencontrent les besoins fondamentaux des personnes qui ont recours à ces services. Ces actes professionnels présentent donc une réelle plus-value, insiste Audrey Maigre. Mais celles qui exercent ces métiers sont-elles reconnues à leur juste mesure ? »

La Covid a livré une réponse. En dépit de la vulnérabilité au virus des travailleuses du secteur et des difficultés rencontrées pour obtenir des masques, les remerciements qu’elles ont massivement reçus des bénéficiaires et de leurs familles leur ont mis du baume au cœur : « Le nombre de retours chaleureux a été incroyable. Ils les ont confortées dans le caractère essentiel de leur travail » confirme Fabian Genard.

Le métier s’est mué en une véritable profession, riche, polyvalente, empreinte d’humanité, et truffée de perspectives de carrière.
Haro sur les clichés : l’aide à domicile, c’est donc bien plus que des tâches ménagères, ce n’est pas qu’un public de personnes âgées et ce n’est pas qu’un personnel féminin et à temps partiel, même s’il reste majoritaire. Elle est devenue une véritable profession, riche, polyvalente, empreinte d’humanité et truffée de perspectives de carrière.

Les SAFA, les services d’aides aux familles et aux aînés, s’adressent à des publics très variés : les personnes vieillissantes, mais aussi les familles, celles dont un des parents souffre d’une maladie grave ou sont confrontées, par exemple, au retour à domicile d’une maman après un accouchement difficile, ou à la scolarisation d’un enfant dans le cadre de l’aide à la jeunesse. Les aides familiales sont depuis peu confrontées au virage de la santé mentale ambulatoire vers le domicile et chargées d’assister ces personnes plus vulnérables en étendant un peu plus leur rôle de briseuses de solitude, chargées d’observer, détecter et relayer une situation qui pourrait se dégrader.

Plus de 10.000 travailleurs et travailleuses sont acti.f.ves dans ce secteur en Région wallonne et, en dépit du budget restant limité, les besoins de recrutement sont criants. Contraints de disposer d’un permis de conduire, ces bâtisseurs d’autonomie exercent pourtant un métier agréé, passionnant et précieux dans une société dont les besoins se complexifient.

C’est ce message que veulent faire passer les initiateurs du projet, accompagné par une agence de communication – Yellow Studio – qui travaille à sa réalisation et dont la concrétisation est prévue en 2022. «  La force du futur projet, c’est le message que feront passer les travailleurs d’aujourd’hui à ceux qui nous rejoindront demain » insiste Audrey Maigre. Un message qui se déclinera sur les réseaux sociaux, dans les brochures disponibles au Forem, les écoles de promotion sociale, dans des capsules vidéo partagées aux quatre coins de la Wallonie et de Bruxelles.

Histoire de dépoussiérer l’image d’une profession qui n’a cessé d’évoluer pour répondre à la fringale d’humanité des personnes qu’elle est chargée d’assister.

* L’AsSAF est une association qui a pour but désintéressé de créer et de de développer les contacts entre les divers services et fédérations, de les valoriser et de promouvoir une vision commune du secteur de l’aide à domicile (secteur SAFA).

© Halfpoint

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