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Soins centrés sur les objectifs de vie : qu’est-ce qui procure de la joie au patient ?

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Qu’est-ce qui vous fait sortir du lit le matin ? Qu’est-ce qui vous motive ? Des questions que les médecins n’ont guère tendance à poser à leurs patients. Pourtant, les soins sont plus efficaces quand on les fait partir des objectifs de vie du patient.

 Le Fonds Docteur Daniël De Coninck investit dans le développement d’une première ligne qualitative, accessible et humaine. Les soins centrés sur les objectifs de vie de la personne sont un concept récent qui gagne en importance pour cette première ligne. “Parce que c’est du win-win pour tous les acteurs concernés,” dit Susanne Op de Beeck de la Vlaams Patiëntenplatform, qui défend les intérêts des malades chroniques.

Lors de l’Académie d’Été du Fonds De Coninck consacrée l’automne dernier aux soins centrés sur les objectifs de vie de la personne, Susanne Op de Beeck a animé un atelier sur la manière d’appliquer ce concept dans la pratique. “Cela consiste à ne pas s’intéresser uniquement aux plaintes du patient, mais aussi à ce qui est important pour sa qualité de vie.”

Autonomie et estime de soi
Cet entretien sur les objectifs de vie permet au médecin et au patient d’avoir une perception plus large de la personne, mais il offre aussi des points d’accroche pour entamer un traitement ou une médication. “Il peut s’agir de petites choses, des choses qui donnaient auparavant de l’énergie au patient et qu’il ne parvient plus à faire, comme faire une promenade ou boire un café. En adaptant par exemple le traitement médicamenteux, en mettant en place un soutien ou en proposant une aide, on peut renforcer l’autonomie du patient et son estime de soi.”

Durant l’atelier, un médecin généraliste a donné l’exemple d’une femme qui souffrait de vives douleurs après un accident et qui ne pouvait plus bien marcher. Avant ce coup du sort, elle prenait beaucoup de plaisir à chanter dans une chorale. En adaptant les médicaments les jours de répétition et en trouvant un bénévole pour la conduire, elle a pu poursuivre une activité qui lui donne de l’énergie et un but dans la vie.

Si les soins partent des objectifs de vie du patient, celui-ci peut aussi être mieux informé des possibilités de choix d’un traitement, par exemple, ainsi que de leurs avantages et inconvénients respectifs. Cela rend la décision moins intimidante. “Le patient comprend mieux sa maladie et le processus thérapeutique, ce qui a des conséquences positives pour sa confiance dans le traitement et dans le médecin. Comme ses propres objectifs constituent le point de départ, le patient est plus motivé et plus enclin à respecter la thérapie.”

Un changement de mentalité de la part du soignant et du patient
Afin d’aider les patients à réfléchir à ce qui important pour eux dans leur vie et à en parler avec leurs soignants, la Vlaams Patiëntenplatform a mis au point l’outil ‘Doelzoeker’. Il s’agit d’une sorte de parcours de vie qui peut être utilisé de nombreuses manières : le patient peut le compléter tout seul, avec son partenaire ou avec un autre aidant proche; il peut l’élaborer avec le soignant, mais celui-ci peut aussi observer comment le patient le complète, il peut lui demander de le faire en une fois ou sélectionner chaque fois des questions ciblées pour un rendez-vous. “C’est un outil ouvert, qui a aussi un effet rassurant pour des patients qui sont nerveux ou peu loquaces quand ils se retrouvent face à un médecin. Il leur fournit des repères et il leur permet de préparer l’entretien.”

Si le concept de soins centrés sur les objectifs de vie de la personne s’implante lentement mais sûrement, Susanne Op de Beeck constate que beaucoup de soignants cherchent encore comment le mettre en œuvre précisément. “Ils adhèrent à la dynamique et ils voient les possibilités, certains d’entre eux travaillent déjà dans le bon sens. Mais beaucoup ne savent pas encore comment s’y prendre concrètement.”

“Un des pièges est que les soignants continuent à s’imaginer qu’ils savent comment bien sentir et évaluer les souhaits du patient et que, par conséquent, ils n’écoutent pas ce qui est important pour lui. Un changement de mentalité est donc indispensable. Tant la formation de base que les formations continues ont un rôle important à jouer à cet égard. Cela demande du temps.”

Ce changement de mentalité concerne aussi les patients. Tout le monde n’a pas l’habitude de répondre à ces questions et les patients risquent de ne pas être prêts à donner une réponse directe. ‘Doelzoeker’ les aide à réfléchir à leurs besoins ou à leurs souhaits et structure leur pensée, ce qui facilite et élargit la communication avec le soignant. “Durant les consultations, le temps est souvent compté. Grâce à ‘Doelzoeker’, le patient et le soignant entrent tout de suite dans le vif du sujet.”

Prendre le temps
Les soignants cherchent aussi à pouvoir s’inspirer de bons exemples. Pour Susanne Op de Beeck, le ‘Zorg-Esperanto’ de Familiehulp West-Vlaanderen est un bel exemple et un bon complément au ‘Doelzoeker’. Bart Deltour, directeur des soins à Familiehulp West-Vlaanderen, a présenté cette méthode lors de l’Académie d’Été. Son organisation a mis au point un modèle pour pouvoir convenir ensemble, en se basant sur les objectifs de vie, de la manière de soutenir le patient dans cette démarche. “L’élément central est le lien. Le point de départ est que les soignants sont invités à se mettre en route avec la personne qui a besoin de soins.”

“Les soins centrés sur les objectifs de vie exigent une tout autre manière de travailler. Ce n’est pas la même chose que de demander au patient, pendant la consultation, quels sont les effets secondaires d’un médicament, ou de prendre sa tension artérielle,” conclut Susanne Op de Beeck. “Cela nécessite un autre type d’entretien, pour lequel il faut prendre du temps et qui ouvre d’autres pistes de traitement. On obtient le meilleur résultat lorsque chaque intervenant – généraliste, kinésithérapeute, ergothérapeute, aide familiale – travaille en fonction de sa propre expertise et avec son point de vue à lui.”

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